J’écoute Le Moulin de Tiersen. Et ses ailes apparaissent sous les yeux. C’était comme hier. Des bolas dans l’air et au fil du temps, voir les trainées de feu après leurs passages. Je voyais comme sur les photos, concentrée sur le bruit du feu fendant l’air, concentrée sur leurs visages tendus. Qui n’étaient concentrés que sur leurs actes et leurs actes seulement.

J’écoute Le Moulin, et je me revois à travers les yeux de mes parents. C’était celui de Daudet et on devait pique-niquer au crépuscule. Il n’y avait personne et la place était choisie. Le soleil a sombré et les moustiques ont rappliqué. Le lendemain, je ne ressemblais plus à rien.

Je n’écoute plus cette chanson. Le lecteur est passé à une autre. Il murmure le bruit de la pluie. Et la fenêtre est grande ouverte. C’est une chanson triste. Je voudrais appuyer aussi lentement sur les touches du clavier. Mais. Non, je ne peux pas. Je voudrais ?

La journée a été douce et vide. Rien. Mais tu sais. Ce n’est pas grave. Ils ne comprennent pas ce besoin que j’ai de ne rien faire. De ne pas penser presque. Juste se laisser aller une fois dans la semaine. Ma mère ne comprend pas. Elle s’ennuie. Mais rien. Alors du coup, elle hausse le ton. Et je choisis le mien.

Je pourrais déambuler dans les chemins sur les notes de ces mélodies d’hier. Je pourrais fermer les yeux et voir les touches du piano se mouvoir. Je pourrais passer ma vie juste à regarder il me semble. Il y a de ces choses qui te fascinent.

Je pourrais te dire l'admiration pour ceux qui osent partir loin au bout du monde. Seul. C'est quelque chose que je ne conçois pas. Parce que je serais terrifiée d'être seule. Et aussi, l'impression de ne jamais pouvoir partager aussi bien ce moment. J'aurais besoin de quelqu'un qui ressentirait les mêmes sensations au fond de son corps. Quelqu'un que les fracas des vagues apaiserait en même temps que moi. Quelqu'un qui resterait bouche bée à regarder droit devant soi. Même s'il n'y a pas de paroles. Même s'il n'y a que le silence. Il y aura toujours beaucoup plus.

 
[ A ne jamais trop se dire, juste confronter les silences. Laisser le temps s'alanguir, venir à bout de l'impatience. Se lever au petit matin, sans trace du moindre chagrin et sous le ciel bleu, aller un peu mieux. ]

Souffler une douceur