"Reposant sur le beau sein mûri de mon amour,
Sentir toujours son lent soulèvement,
Toujours en éveil dans un trouble exquis,
Encore son souffle entendre, tendrement repris,
Et vivre ainsi toujours-ou défaillir dans la mort."

John Keats.





© Laurie Sparham



Je suis restée silencieuse lorsque ce film s'est achevé. Dehors, la pluie percutait les vitres. Dehors, la pluie et moi en-dessous. Je suis restée silencieuse et je ne sais pas pourquoi. La salle de cinéma. Les fauteuils rouges et le noir jusqu'à l'extrémité du générique. Personne ne s'est levé. Prendre le temps, d'ouïr ce poème jusqu'au bout. Jusqu'au dernier souffle, celui qui vient après le point final.

Je ne sais pas vraiment pourquoi ce film et pourquoi ce soir-là. Je ne l'avais pas vue depuis des mois. Et juste ce film à partager. Après, nous avons aussitôt reprise chacune notre route.

Bright Star, c'est de la lumière et des couleurs. De l'ombre et des nœuds qui se nouent, se délient et reviennent plus forts. Ce film c'est des silences et des présences, discrètes; ou non. C'est une histoire d'amour. Et c'est une histoire d'écriture. De vers, de rimes et de ressentis. Ce n'est pas un film qui parle de poésie, même si c'est John Keats, tu sais. La poésie n'est pas le sujet du film. Elle l'est.

Depuis, je suis toujours là-même.

Entretemps dans la semaine, il y a eu On s'habitue aux fins du monde. Et je crois que ce livre aussi, m'a mise à la renverse. Je lisais doucement, prenant le temps de me dire que c'était fou. Juste fou ce don qu'il a entre trois phrases de faire passer autant de choses. Je l'ai fait durer ce livre. Je ne voulais pas me rapprocher de la fin mais il le fallait bien. Je ne sais pas si je le relirais ou non. Je ne relis pratiquement jamais. Mais il y a ces mots recueillis précieusement comme les premières gouttes de pluie.
Il y a eu ce billet pour voir le château de Versailles, ses bassins et -M- juste devant. Une heure avant minuit me décider. Je n'ai pas flanché quand il a fallu mettre un devant le nombre de place. J'ai revu une table en terrasse, à une parallèle du port et qu'il ne fallait compter que sur soi pour voir les personnes que l'on voulait voir. Même de loin.

Il y a beaucoup de choses qui me frôlent, me percutent, me tombent à la renverse. Un moindre fait, un quelconque geste. Une alternative et une nouvelle glissée au hasard. Rien n'empêche d'afficher les sourires ou de masquer les déceptions.


" On est surpris au début quand de nouveaux malheurs arrivent et s'ajoutent aux anciens, on se dit non ce n'est pas possible, pourquoi. Alors on résiste et on se réveille un jour pour voir qu'on n'a pas vécu, on a juste serré les poings et continué à avancer. Parfois on se fait peur à avoir autant de forces, ça a quelque chose de monstrueux qu'on ait réussi à vivre. "

On s'habitue aux fins du monde, M. Page.

Souffler une douceur