Tous les ans, guetter les mêmes. Le cycle des fleurs du printemps, d'été et les premiers fruits rouges. Je pourrais vous dire le colza et ensuite, les coquelicots qui s'y ajoutent. Immédiatement, je devrais vous dire que je vois blondir l'orge et les blés. Tous les jours, quatre fois. Et que ça, tout de même, m'appelle à m'émouvoir.

Les nouvelles se prennent au téléphone et toujours les mêmes questions. Peut-être que. Je voudrais qu'ils arrêtent. Seulement qu'ils cessent de voir les mêmes possibilités à la moindre occasion. J'annonce mes départs et tous me répondent que peut-être je ne rentrerais pas seule. Et moi, dans tout ça, j'ai juste envie de crier. Que peu leur importe. Que si c'était le cas et lorsque ce sera le cas, je serais égoïste plus que de raison. Mais je souris en levant les yeux au ciel. Et je cache derrière cet air le mal que ça fait tout le temps ce genre de réflexion. L'absence qui se souligne, le creux qui devient béant.

Je me recentre sur les cadeaux à envoyer ce mois-ci. Papa part avec le cd que je lui ai offert dans sa voiture. Et j'en suis contente. Je me refuse à lui offrir un polo. Tu parles d'un cadeau. Une enveloppe est prête à traverser l'océan. Une autre attend son présent pour rejoindre la Bretagne. Il n'en restera qu'une et c'en sera fini de juin. Ce mois s'entrecoupe de mon neveu qui me fait sourire en me disant qu'il "aime bien garder ses chaussettes à les pieds", et de l'autre qui témoigne de sa présence sous la peau de ma sœur.

Ce mois m'échappe déjà. Dix jours. Vingt jours. Deux fois des retrouvailles si différentes et pourtant, je crois bien qu'ici sera présent ces deux jours-là.

Il y a le passeport qui n'attend que moi. Les billets qui sont toujours à prendre. Ce vaccin, ce billet de concert, les nouvelles lentilles. Et je reste là; le panier de  cerises d'un côté, le plat de fraises de l'autre. Inerte. A ces moments-là, je me répète de plus en plus fort, surtout, surtout ne pas oublier de m'émerveiller.


Souffler une douceur