A trop jouer avec les lettres, j'ai parfois du mal à avoir tout bon. L'inconvénient quand on écrit à base d'abréviations, c'est que je désapprends à écrire. Il y a, parfois, de grands moments d'hésitation quand je suis penchée au-dessus de ma feuille. Hier, on m'a demandée mon âge. J'ai répondu sans hésiter. Sans me demander ni qui ni quoi. Ce chiffre à boucles qui me semble aussi étranger aujourd'hui qu'hier. C'est comme si je répondais pour quelqu'un d'autre.
Doucement, je reprends le crayon à papier et les pages blanches. Je gribouille des signes que seule, moi, pourrait relire dans deux semaines. J'ai cette explication linéaire à préparer pour jeudi prochain. Alors, on entre peu à peu dans les premières lignes de l'Ingénu. Et j'ai beau me plaindre, parfois souvent, il y a toujours cet élan à deviner tout ce qui se déguise entre les virgules et sous les phrases trop longues. Trois livres sont déjà engloutis. Quatre ce soir. J'espère. Et après quand tout sera lu, il y aura les préfaces à décortiquer. Ces mines d'or que l'on oublie trop facilement.
Quand j'ai ouvert les yeux ce matin, la pluie dévorait les vitres. Le ciel était gris et je croyais qu'il n'était que neuf heures. Grossière erreur. Elle était déjà en route. Sous la pluie. Comme si la météo se jouait de nous et la mettait en condition.

Souffler une douceur